Comment prévenir les blessures?

Le Dr. vet. Karin Leibbrandt a rédigé un document qui mérite d’être connu sur ce thème important (Prévenir les blessures), voici donc quelques extraits. Dr. Leibbrandt dirige un centre de réhabilitation au Pays-Bas, elle a également publié un ouvrage sur l’entraînement correct du cheval, cf. partie Ressources ci-dessous.

Ce que vous pouvez faire pour garder votre cheval en bonne santé

Saviez-vous que la plupart des blessures sont causées par une surcharge chronique ? Et que cette surcharge chronique résulte très souvent d’un entrainement dans une posture incorrecte ?

Par exemple, les blessures aux tendons apparaissent souvent comme aiguës, alors qu’elles se construisent généralement au cours du temps lors d’une longue période de contrainte déjà trop élevée sur le tendon. Un simple faux pas peut soudainement faire basculer la situation et générer une blessure sévère.

En fait, on pourrait dire que le cheval se blesse si les contraintes qu’il subit sont supérieures à sa capacité d’y faire face a un moment donné. L’organisme du cheval dans une telle situation est en surcharge. Il pourra compenser pendant un certain temps, mais à terme des lésions apparaîtront.

Nous discuterons ici de la surcharge crée par une posture incorrecte: en quoi elle consiste, comment la reconnaître et ce qui la provoque.

1. Qu’est-ce qu’une mauvaise posture et quelles en sont les conséquences pour le corps du cheval?

Si un cheval est entrainé dans une posture incorrecte, que ce soit parce que le cheval n’est pas suffisamment fort pour porter le cavalier, soit parce que le cavalier le maintient ainsi, le garrot va descendre entre les omoplates donc la première partie du dos va se creuser. Le cheval voudrait relever sa tête et son encolure, mais l’action de la main du cavalier l’empêchant, il n’a pas d’autre choix que d’enrouler la partie supérieure de son encolure et donc de raccourcir sa partie inferieure.

La ligne du dessous s’allonge de plus en plus tandis que la ligne du dessus raccourcit. Les antérieurs restent plus longtemps au sol sous la masse et les postérieurs allongent leur phase de rétraction. Contrairement à la croyance populaire, le bassin s’ouvre au lieu de s’engager.(…)

Voyons plus en détail ce qui va se passer dans son corps quand le cheval est travaillé dans une posture incorrecte.

1) L’encolure se casse en hyperflexion entre les 2èmes et 3èmes vertèbres cervicales, ce qui met de la pression sur le ligament nuchal et la bourse synoviale, située entre le ligament et la deuxième vertèbre cervicale.

2) La courbe en S de l’encolure est accentuée, ce qui comprime les 2 dernières vertèbres cervicales et la première vertèbre thoracique, C6 et C7 et T1. La pression dans cette zone augmente. Rien d’étonnant que l’on trouve fréquemment de l’arthrose, ou d’autres problèmes, à cet endroit.

3) Le garrot s’effondre et la portion du dos qui suit se creuse. Les dernières vertèbres du garrot et les vertèbres thoraciques juste derrière se rapprochent, ce qui peut conduire à des conflits de processus épineux (« kissing spines »).

4) Le rein s’oriente vers le haut, de façon a compenser l’abaissement des vertèbres thoraciques, ce qui rapproche les processus épineux des dernières vertèbres thoraciques et premières lombaires. Ceci est à l’origine de conflits de processus épineux dans cette région.

5) La cage thoracique ne fait pas seulement que s’effondrer entre les omoplates. En raison de sa dissymétrie naturelle, le cheval se propulse plus avec postérieur que l’autre. Par exemple, le postérieur droit qui pousse en direction de l’antérieur en diagonal, donc l’antérieur gauche. Cela entraîne une torsion du bassin donc des contraintes asymétriques sur les ligaments sacro iliaques. Ce phénomène est à l’origine de l’arthrose de l’articulation sacro iliaque, pathologie diagnostiquée de plus en plus couramment.

6) La dissymétrie naturelle du cheval fait qu’il transfère plus de poids sur un antérieur que sur l’autre. Si nous travaillons notre cheval depuis des années avec plus de poids sur l’antérieur gauche que sur l’antérieur droit, le gauche aura plus de risques de blessures et souvent ce sabot devient plus plat et plus large pour supporter la différence de poids.

7) La descente de la cage thoracique du cheval entre ses épaules entraine plus de poids sur les antérieurs. La longueur de la phase au sol des antérieurs devient de plus en plus longue. Le membre au sol est ainsi plus dessous qu’en avant du corps.

Cela augmente la durée, la charge et l’angle du membre au moment de la rétraction, résultat : les structures du bas du membre sont mises fortement à contribution.

8) Le boulet est suspendu comme dans un hamac, nommé : appareil suspenseur du boulet. Il est composé du ligament suspenseur, des os sésamoïdes et de ses ligaments ainsi que des tendons superficiel et profond du doigt. Si l’antérieur n’est pas chargé correctement, ce système est fortement sollicité, en particulier le ligament suspenseur.

C’est pourquoi la majorité des blessures se retrouvent sur ce ligament. Il s’agit souvent d’ailleurs des lésions chroniques.

9) Le fait que le cheval charge trop les antérieurs a un impact sur les tendons superficiels et profonds. Or, le tendon fléchisseur profond fait partie de l’appareil naviculaire. Avec l’arrivée de différents systèmes d’imageries permettant de visualiser les structures internes du pied, nous relevons régulièrement des problèmes au niveau de l’insertion du tendon fléchisseur profond sur la troisième phalange. La zone naviculaire elle-même peut se trouver surchargée.

10) En observant l’arrière-main, on reconnait la posture incorrecte d’un cheval à ses postérieurs qui restent au sol trop loin derrière la masse. Comme ils doivent pousser alors que le cheval est sur les épaules, leurs articulations doivent s’ouvrir considérablement.

Le grasset et le jarret sont spécialement sollicités. Leur extension produit des contraintes sur les tendons et leurs insertions. On y trouve fréquemment des lésions au niveau des insertions du ligament suspenseur.

Liste non-exhaustive.

Si un cheval a été travaillé longtemps dans une mauvaise posture, son corps peut se déformer pour s’adapter à cette répartition des charges.
Les muscles et les fascias se contractent à certains endroits au point de devenir douloureux et tendus. D’autres parties du système (myo-) fascial sont moins utilisées et se détendent. Cela provoque d’autres compensations dans le corps.

Les images ci-dessus montrent qu’une posture incorrecte pendant l’entraînement se reflète également dans la posture du cheval à l’arrêt. Une fois que vous entrainez votre œil, ce sera facile à reconnaître.

En d’autres termes, il va commencer à compenser cette surcharge corporelle et (légère) avant d’être boiteux ou présenter de sérieux problèmes de dos.

En prenant ces signes en compte rapidement, vous pourrez éviter que le cheval ne se blesse au point que vous n’ayez à entrer dans un long processus de réhabilitation. Ou pire.

2. Les fascias

L’étude des fascias prend de plus en plus d’ampleur, que cela soit en médecine humaine ou équine.

Que sont les fascias exactement?

Les fascias sont constitués de tissu conjonctif et forment un réseau tridimensionnel de membranes partout dans le corps. Certaines parties sont très fines, d’autres s’épaississent en ligaments et tendons (cf. ci-contre). Le réseau relie le corps entier des oreilles à la queue, de la peau aux muscles et aux organes.

Les fascias sculptent le corps. Imaginez une balle qui rebondit. Si je la jette par terre, alors la balle rebondira. Lors de l’impact de la sphère au sol, celle ci se déforme légèrement. L’énergie est stockée dans cette déformation (énergie potentielle élastique) puis est restituée, ce qui fait rebondir la balle. En quittant le sol, elle retrouve sa forme d’origine. C’est le principe de la tensegrité.

C’est pareil avec le corps du cheval : ses tissus dynamiques, comme les tendons, présentent également ce potentiel élastique : au moment de l’impact, les structures de membres se compriment comme des ressorts sous la masse. Puis l’énergie potentielle élastique est restituée lors du rebond. Cela ne nécessite quasiment aucune énergie musculaire, à condition que le système fascial soit utilisé correctement. Pour être optimal, les structures doivent être alignées en un équilibre dynamique et la suspension ne doit pas être gênée par des restrictions dans les fascias. (cicatrices…)

Ainsi au moment de l’impact, le corps du cheval se déforme comme le fait la balle qui atterrit. La déformation est limitée grâce aux fascias. Ces derniers permettent de maintenir l’ensemble afin d’en assurer un retour à la forme originale après l’impact.

Les fascias assurent aussi le glissement des différentes parties du corps, spécialement les muscles qui pourront ainsi travailler indépendamment les uns par rapport aux autres, mais également ensemble, d’où l’dée de la chaîne myofasciale.

Ainsi, lorsqu’on entraîne un cheval, on n’entraîne pas seulement ses muscles et son endurance mais aussi ses fascias. Les fascias s’adaptent à la charge. Ils le font en s’épaississant, en rajoutant des couches ou adaptant leurs caractéristiques. Par exemple, en devenant plus ou moins élastique, ce qui démontre son qu’ils ont leur propre intelligence.

Au début de l’entrainement, habituer le cheval à un schéma corporel juste exigera de sa part beaucoup de force musculaire, ce jusqu’à ce que les fascias se soient ajustés et qu’ils puissent prendre en charge une (grande) partie de la force musculaire. Chaque fois qu’un cheval se met en mouvement, il se crée un signal électrique passant à travers les fascias. Ce signal provoque la contraction du tissu conjonctif, lui indiquant comment s’adapter à la charge.

Grâce à l’étude de ce qu’on appelle la séquence physiologique, nous savons que les tissus mous et conjonctifs sont les premiers tissus à être impactés par un changement de posture. Les compensations aboutissent ensuite à des changements de structures des tissus dynamiques et finalement les tissus osseux, tels que les os, se déforment

Pour détecter la genèse de problèmes, nous devons donc observer de près les muscles et les fascias, via la posture et la silhouette du cheval. En palpant et les structures, nous pouvons établir si ces zones sont douloureuses, contractées ou au contraire exagérément insensibles.

3. Comment reconnaitre les signes avant-coureurs d’une blessure?

On recherchera d’abord ces signes au niveau système (myo)fascial et à reconnaitre comment le cheval les manifeste.

Le cheval s’exprime via son comportement, sa posture, ses mouvements et ses expressions faciales.

Comportement et communication

Comme cela a été expliqué précédemment, des restrictions et des surcharges dans les fascias peuvent être très douloureux.

Si un cheval est mal à l’aise lors d’une séance d’entrainement, spécialement sous la selle, il montre généralement des signes tels que des fouaillements de queue, des grincements de dents, des oppositions aux aides, fuit, refuse de se porter en avant, résiste lors des transitions etc.

Certains de ces comportements sont très clairs, d’autres peuvent être très subtils, notamment les expressions faciales : des lèvres tendues ou plissées, des rides autour de l’œil, des tensions sur le côté de la tête, un œil exorbité et fixe, une bouche ouverte qui mousse ou salive de manière excessive.

Certains de ces comportements sont très clairs, d’autres peuvent être très subtils, notamment les expressions faciales : des lèvres tendues ou plissées, des rides autour de l’œil, des tensions sur le côté de la tête, un œil exorbité et fixe, une bouche ouverte qui mousse ou salive de manière excessive.

Des visuels ici : L’éthogramme de la douleur selon Dyson

Physiquement

…Le cheval peut être raide au début de la séance, puis les foulées seront raccourcies au fil du temps, sans qu’il n’y ait de boiterie. Il pourra être sensible du dos, en particulier dans la région lombaire. Les premières tensions musculaires observables se situent généralement au niveau des muscles brachiocéphaliques (au niveau de la base de l’encolure), des lombaires, juste derrière le crâne, dans l’encolure et le poitrail.

La zone du passage de sangle devient également rapidement sensible, pas nécessairement à cause de la sangle elle-même, mais à cause des contractures dans les fascias qui sont connectés avec l’entiereté du corps.

Comme expliqué dans le chapitre 2, les tendons font partie du système fascial. Les muscles sont composés d’un réseau de fascias qui constituent les tendons.

Parce que le tissu conjonctif connecte l’organisme dans son entier, la présence de contractions dans le réseau fascial induit un excès de tension dans les tendons, résultant en une sensibilité accrue, tout spécialement sur les tendons intermédiaires, sans pour autant qu’il y ait des lésions visibles dans les tissus.

Un cheval atteint de douleurs au niveau de son système myofascial ne peut pas développer harmonieusement ses muscles voire présenter une musculature sous développée. La douleur est une importante source de stress, pouvant induire des difficultés à maintenir les chevaux en état.

Silhouette de profil

  1. Des lignes dans les muscles de l’encolure
  2. Des raideurs dans les muscles du dessous de l’encolure
  3. Peu de muscles en avant de l’omoplate
  4. Une dépression devant le garrot
  5. Des creux marqués derrière les épaules
  6. Un changement brusque de pente dans la ligne de garrot
  7. Des muscles dorsaux peu développés
  8. Des lignes dans les muscles autour de l’omoplate et dans le triceps
  9. La ligne du dessous relâchée
  10. La ligne de dessus raccourcie
  11. La zone lombaire bombée
  12. Le bassin trop incliné vers l’arrière
  13. Les muscles sous la pointe de la hanche peu développés

14. La partie crâniale du muscle fessier développée, la caudale moins développée

15. Des lignes apparentes entre les muscles des ischio-jambier

16. un cheval qui se tient sous lui du devant

17. un cheval qui se tient sous lui du derrière

18. Un cheval qui ne se tient pas au carré
19. La présence de la ‘’bosse du sauteur’’


20. Les sabots asymétriques et / ou talons fuyant

(…)

[Liste complète et illustrations dans le ebook Prévenir les blessures ]

Il va sans dire que tous les observables ne sont pas toujours présents. Ils peuvent être très visibles ou à l’inverse très discrets. Le plus tôt vous les reconnaitrez et les travaillerez, plus le corps de votre cheval pourra se redresser facilement et rapidement.

La plupart des boiteries proviennent de douleurs subcliniques installées depuis longtemps à quelque part dans le système fascial. Subclinique signifie que nous les avons pas clairement perçus et le cheval ne montre pas encore de signes clairs.

Ils seront seulement remarqués quand le cheval deviendra boiteux ou qu’il montrera des symptômes graves. Souvent, les problèmes peuvent être résolus, à condition que le cheval soit observé en entier et non uniquement à l’endroit de LA douleur comme par exemple en cas de boiterie. Ca peut un long processus.

En tant que vétérinaire, je me suis interrogée pendant près de 20 ans sur l’origine des très nombreuses boiteries que j’avais à traiter : pourquoi celles-ci récidivaient si souvent ? Pourquoi devions-nous euthanasier tant de chevaux encore jeunes ?

Il y a plusieurs raisons à cela, mais de loin la cause principale est l’entrainement!! En particulier l‘influence d’une mauvaise posture du corps et l’impact du mouvement asymétrique sur le schéma locomoteur par le système fascial.

Une séance d’entraînement qui est efficace pour le cheval lui permet des mouvements sans efforts, élastiques et rythmés. Les mouvements rythmiques parcourent l’ensemble du corps. La tête, au pas, va faire un mouvement pendulaire. Au trot, elle a un léger mouvement de rotation et au galop la tête monte et descend. La queue devrait être portée détendue et spécialement au trot se balancer de gauche à droite en rythme avec le mouvement.

SI un cheval commence à développer des problèmes par la suite d’un entraînement incorrect ou d’autres facteurs, vous les reconnaitrez tout d’abord à la perte de ce mouvement élastique et rythmique qui parcours tout le corps. En pratique, j’entends souvent que les problèmes sont apparus abruptement mais en posant d’autres questions, le propriétaire indique généralement que le cheval a d’abord commencé par se déplacer de manière plus raide en début de séance ou qu’il avait changé de comportement..

Les déviations dans la ligne du dessus, telles que nous les avons décrites ou une réduction de la fluidité du mouvement, indiquent des tiraillements et des douleurs (modérées) dans les fascias.

Si un cheval maintient une posture incorrecte pendant longtemps, les fascias s’y adaptent. Il est même possible que les fascias soient tellement contractés qu’une bonne posture ne soit même plus possible.

Avec l’aide de thérapies libérant les fascias, nous pouvons aider le cheval à retrouver une posture correcte. Or cela ne sera pas forcément suffisant. Pour que le cheval puisse garder ce schéma corporel optimal, il faudra prévoir de le travailler de manière spécifique.

Grâce à cet entrainement raisonné, les fascias se contracteront, s’adapteront et se renforceront dans la bonne posture, ce qui facilitera le maintien du schéma corporel. Au départ, il sera important de s’assurer que le garrot monte, puis comme les fascias deviendront plus forts, les muscles auront moins à faire. Après une longue durée d’entrainement dans le bon sens, le cheval va présenter une meilleure posture, même lorsqu’il sera au pré.

Tendons, muscles et fascias forment un tout indissociable

Comment prévenir les troubles des tendons?

Les personnes souffrant de graves problèmes de dos rapportent souvent qu’elles souffraient d’un peu de raideur et / ou de gênes dans le dos depuis des semaines jusqu’à ce qu’un mouvement soudain attise la douleur.

C’est exactement la même chose pour un cheval. C’est pourquoi il est important d’observer les premiers signes de raideurs ou d’inconfort, afin d’intervenir avant que de plus gros problèmes surviennent.

Un cheval qui a une contracture dans son système fascial ne peut pas utiliser de manière optimale l’énergie élastique qui se crée avec la flexion des membres afin de pouvoir rebondir comme un ressort.

Si le système fascial ne peut pas être développé efficacement pour favoriser le mouvement ou porter le cavalier, il lui faut plus d’effort, d’énergie et de force.

Cage thoracique equilibrée et desequilibrée

Par conséquent, il est extrêmement important de construire et de maintenir le système (myo) fascial de votre cheval en bonne santé.

Libération myofasciale | Equine Fascia and Trauma release

4. Comment les mauvaises postures se développent chez le cheval?

A. Le poids du cavalier et l’encolure raccourcie

Ici la cage thoracique fait des mouvements ascendants et descendants sous le poids du cavalier

Porter un cavalier est un challenge le cheval.
Saviez-vous que le poids du cavalier surcharge principalement les antérieurs, y compris pour les chevaux de dressage?

Un cheval n’a pas de clavicule, ce qui signifie que la cage thoracique est suspendue par une ceinture de muscles et de fascias (la sangle thoracique) entre les membres antérieurs, tandis que l’arrière-main est fermement relié aux postérieurs par les os de l’articulation de la hanche. La cage thoracique du cheval peut donc descendre et avancer (entre les épaules) plus facilement que l’arrière- main. Le poids du cavalier sur la cage thoracique du cheval crée une force vers le bas, mais aussi vers l’avant entre les épaules du cheval.

Le cheval est trop raccourci dans l’encolure et le cavalier n’est pas equilibré. La cage thoracique du cheval va en direction du bas et en avant sous le poids du cavalier. Notez la hauteur du garrot par rapport à la croupe.

Si le cheval ne se stabilise pas sous l’effet de cette charge supplémentaire, sa cage thoracique s’affaisse distalement et vers l’avant entre ses antérieurs. Dans chaque volte elle va en plus subir une rotation (généralement en direction de l’intérieur) et faire tomber le cheval sur son épaule intérieure.

De plus, la dissymétrie naturelle du cheval peut l’amener à tomber sur son épaule externe. Dans les deux cas, dès que la masse n’est pas répartie correctement entre les deux épaules, le cheval est déséquilibré verticalement et ne peut plus élever sa cage thoracique ni son garrot.

Pour s’assurer que le cheval soit à même d’endurer les forces induites par le poids de son cavalier sur ses tissus et son système fascial, il est important de l’entrainer de manière qu’il puisse neutraliser ces forces, maintenir sa cage thoracique élevée, symétriquement entre ses épaules. Ce travail se fait graduellement, d’abord au sol, puis monté avec une selle bien adaptée !

Même cheval que la photo ci-dessus, mais avec la bonne longueur d’encolure et un cavalier équilibré. La cage thoracique du cheval va en direction du haut et en arrière, soutenant le poids du cavalier. Notez la différence dans l’expression faciale du cheval.

En raison du raccourcissement de l’encolure, la colonne du cheval va se tordre dans différents sens, la cage thoracique va s’affaisser et empêcher les postérieurs de s’engager optimalement et ainsi reporter plus de poids sur les antérieurs qui auront ainsi encore plus de masse à gérer.

B. Impact du cavalier déséquilibré

Cheval trop raccourci dans son encolure : l’animal se pend dans les mains de son cavalier, lequel se pend dans la bouche de son cheval.

Lorsque vous êtes en selle, vous êtes assis sur vos ischions, sur la cage thoracique du cheval. A chaque foulée, le cheval se soulève sous vos ischions, vers le haut et vers l’avant. Votre buste doit rester stable pour suivre ce mouvement. Si votre bassin, votre cage thoracique et votre tête ne sont pas alignés, votre poids vous entrainera vers l’avant à chaque pas, en direction du garrot de votre cheval.

Cela met votre cheval en difficulté pour élever son garrot : plutôt que de vous soulever, il vous propulsera vers l’avant. Vous serez pour sûr encore plus déséquilibré ! Vous entrez alors dans un cercle vicieux où le cheval et le cavalier se déséquilibrent mutuellement.

Le cheval perd l’équilibre, relâche sa ligne du dessous et tombe sur les épaules. Grâce à la position en demi-suspension, le cavalier peut se stabiliser et garder son centre de gravité en arrière.

Vous tenterez – involontairement – de vous stabiliser en mettant de la tension dans vos jambes, vos bras et vos mains.

Votre cheval devra s’équilibrer en contractant son dos et en s’accrochant à ses épaules au lieu d’élever son garrot et de ramasser sa masse avec des postérieurs. Parfois, le cheval va même peser dans vos mains, vous obligeant à tirer en retour, ce qui a pour effet de raccourcir encore plus l’encolure…

Vous avez donc compris qu’il faut éviter que votre poids ne se déplace trop avant sur le dos de votre cheval. S’asseoir complètement immobile n’est pas non plus une solution, car votre cheval doit pouvoir remonter son dos et avancer à chaque foulée. Vous devez autoriser ce mouvement dans votre corps, mais vous pouvez jouer avec la quantité de mouvement que vous souhaitez autoriser et dans quelle direction vous voulez le laisser aller. Vous le faites principalement dans vos articulations de la hanche.

Le cheval est stable, il gaine sa ligne du dessous en gardant une bonne longueur dans son encolure. Cela permet au cavalier de s’asseoir droit. Notez la position du garrot par rapport a la croupe

Avec vos pieds dans les étriers, vos articulations de la hanche ainsi que vos genoux et vos chevilles fonctionnent comme des amortisseurs. Dans une posture correcte, votre poids sera réparti sous vos ischions, vos cuisses et vos pieds.

Un buste stable, des chevilles, des genoux et des hanches souples assurent le contrôle de votre corps, que vous pourrez maintenir loin du garrot et de l’encolure du cheval. Même s’il abaisse sa cage thoracique et/ou propulse fort avec ses postérieurs, vous devez être si stable que votre centre de gravité ne se déplacera pas en avant pour surcharger les antérieurs de votre cheval.

Pour la grande majorité des cavaliers, il est plus facile d’adopter une position en demi suspension, en particulier sur un cheval qui lui-même n’est pas stable dans sa posture. Dans la littérature classique, cette position du cavalier est également décrite comme la position de remonte. «Remonte» est un terme allemand désignant un jeune cheval au début de sa formation. Ceci est également valable pour un cheval dont le dos et le garrot ne sont pas encore stables, qu’importe son âge ou son entraînement préalable.

C. L’intensité de l’entraînement et temps de récupération

Bien qu’un cheval semble très fort et que son corps soit capable d’accélérations très puissantes, son organisme n’est adapté qu’à une activité spécifique.

Par nature, un cheval se déplace à une vitesse lente, généralement au pas, pendant la majeure partie de la journée. Il parcourt ainsi 30 à 50 km par jour. Les explosions de puissance qu’il utilise uniquement lorsqu’il doit fuir un danger immédiat ne sont que d’une courte durée de temps.

Il peut être utile de se faire une journal sur l’entraînement de son cheval. (avec par ex. le type d’entraînement, la durée, des observations, ainsi que par ex. les dates des soins, des concours, des formations etc.). Néanmoins, le plus important c’est d’être à l’écoute de son cheval et d’adapter son travail en fonction.

En comparaison, la plupart des chevaux (de sport) sont généralement immobiles, même s’ils sortent dans un paddock. En parallèle, ils sont travaillés de manière plutôt intensive, environ une heure (presque) quotidiennement. L’entrainement est donc physiquement difficile.

La recherche a montré que le temps de récupération d’un cheval après un entraînement dur est plus long que celui d’un humain. Si nous entraînons un cheval sans lui donner suffisamment de temps de récupération, il deviendra surentraîné. Cela signifie que pendant une heure d’entraînement, un cheval est physiologiquement capable de périodes assez courtes (en minutes) de travail intense et doit ensuite récupérer.

Si nous ne lui donnons pas le temps de récupérer, le cheval sera trop fatigué, ce qui lui fera perdre sa coordination et le risque de blessures augmentera. Un cheval fatigué perdra également plus facilement son schéma corporel correct. Combiné au poids du cavalier, cela entrainera un affaissement de la cage thoracique entre les épaules et un dos qui se creuse plus qu’il ne le devrait, donc une augmentation significative des causes de blessures.

En plus du temps de récupération suffisant pendant le travail, nous devons également penser au temps de récupération entre les entraînements. Si nous entraînons un cheval aujourd’hui et que nous touchons aux limites de sa capacité physique, il aura besoin de 36 à 48 heures de récupération. Ce qui ne signifie pas que le cheval doive rester immobile, bien au contraire. Le mouvement favorise la récupération grâce à une augmentation du flux sanguin, mais il doit se faire sans stimulus d’entrainement.

Lors du travail, nous cherchons à connaitre les limites de la force et de l’endurance d’un cheval. Le corps reçoit tous les stimuli pour devenir plus fort. Ce qui va lui permettre de mieux gérer ce type d’entraînement à l’avenir.

Ainsi, si nous entrainons un cheval aujourd’hui, il va se créer des petites lésions dans le corps (stimulus d’entrainement) qui nécessitent un temps de récupération. A mesure que l’organisme récupère, il se fortifie (supercompensation). Cela prend cependant de 36 à 48 heures. Si nous entrainons à nouveau le cheval avant qu’il n’ait fini de récupérer, nous ajoutons une nouvelle couche de dégâts et amplifions ceux de la séance précédente. Cela s’appelle du surentrainement. Les fascias y répondent en se resserrant et deviennent douloureux empêchant ainsi le cheval d’adopter une posture de travail (ou même au repos) correcte.

Ainsi, lorsque nous entraînons un cheval, nous devons l’écouter très attentivement. Un cheval fatigué doit ralentir ou s’arrêter. Un cheval qui, le lendemain, montre des signes de fatigue, des muscles tendus ou qui est, par exemple, très morose aura besoin de mouvement mais ne devrait pas suivre un véritable entraînement.

D. L’âge

Il est actuellement de coutume de commencer à monter un cheval vers l’âge de 3 ans, souvent sans une efficace préparation à pied. Cette pratique mériterait d’être revue : à cet âge, le cheval n’est pas complètement développé. Sa croissance n’est pas terminée, il grandit en hauteur, mais surtout il s’étoffe et s’élargit, ce qui le rend plus stable. Vers 7 ou 8 ans, la plupart des chevaux deviennent plus lourds.(…)

De 4 à 4,5 ans, selon le cheval, la selle et le cavalier peuvent être introduits. Les entraînements d’un jeune cheval sous la selle sont de courtes séances où nous devons à nouveau écouter attentivement le cheval pour observer quand il est fatigué. C’est pourquoi il est important que le cheval soit calme et confiant lors de l’entraînement. Un cheval stressé ne montre pas sa fatigue et donc se surentraine facilement.

Des visuels sur le développement du squelette du cheval : Equine skeletal maturity timeline

E. L’hypermobilité

L’hypermobilité est une élasticité accrue du tissu conjonctif. Les articulations sont moins bien stabilisées et ont une amplitude de mouvement accrue. Nous pouvons l’observer lorsque la descente du paturon est extrême aux postérieurs voire aux quatre membres. Sur la jument ci- dessus, le boulet vient toucher le sol, impactant les jarrets, les grassets et le bassin.

Parce que nous avons commencé à élever des chevaux de plus en plus grands, rectangulaires, à longues jambes et aux mouvements amples, nous avons inconsciemment commencé à sélectionner l’hypermobilité.

L’hypermobilité signifie que le tissu conjonctif est plus élastique que la normale. Cela peut se produire à différents degrés. Un peu plus de mobilité a un effet bénéfique pour les possibilités de mouvement alors qu’une trop grande hypermobilité va entrainer un cheval qui ne peut pas stabiliser son propre corps, encore moins porter un cavalier.

Un cheval hypermobile en combinaison avec une grande taille et une construction fine (cheval étroit), a beaucoup plus de difficulté à trouver et à garder son équilibre. Le tissu conjonctif et les muscles peuvent s’adapter et se renforcer, ce qui s’applique également au tissu conjonctif hypermobile, mais il restera toujours trop élastique. Dans les cas extrêmes, les chevaux souffrent précocement de blessures chroniques, notamment des tendons et des articulations.

Un cheval hypermobile est donc surchargé beaucoup plus rapidement qu’un cheval non hypermobile et une position correcte du corps est encore plus essentielle pour ce type decheval.

Il est souvent difficile pour les chevaux hypermobiles d’avoir de la longueur dans l’encolure, surtout sous la selle. Ils fléchissent leur encolure d’ eux-mêmes (photo du haut). En effet, ils sont instables et manquent d’équilibre et de force pour maintenir suffisamment leur ligne du dessous. Avec ces chevaux, la première étape de l’entraînement est d’arrêter de s’encapuchonner (photo du milieu), puis vient la longueur dans l’encolure (photo du bas, même cheval plus loin dans son entraînement).

(Vous trouverez davantage d’illustrations notamment sur l’hypermobilité dans l’ebook d’origine sur le site de Dr Leibbrandt, lien dans la partie Ressources ci-dessous).

Conclusion

Maintenant que vous avez lu tout cela, vous pouvez comprendre que le raccourcissement de l’encolure est la cause la plus importante d’une mauvaise posture corporelle du cheval.

Le cavalier peut raccourcir consciemment ou inconsciemment l’encolure ou certains chevaux doivent de raccourcir leur encolure parce qu’ils n’ont pas l’équilibre et la force pour l’étendre.

Les facteurs dont nous avons discuté ici qui font que le cheval raccourcit son encolure sont:

–  Impact du poids du cavalier sur son dos

–  Dissymétrie naturelle

–  Main contreproductive du cavalier

–  Cavalier déséquilibré

–  Entraînement trop intense

–  Entraînement trop jeune sous la selle

–  Hypermobilité

Chacun de ces facteurs représente un risque de surcharge de la capacité du cheval. Plus il y a de facteurs qui s’appliquent, plus nous devons être prudents et adéquats dans notre formation.

Il y a bien sûr aussi des conditions préalables importantes pour obtenir et maintenir une posture correcte, comme une selle, filet et mors adaptés. Sabots, dents sains et équilibrés. Alimentation et logement adaptés a ses besoins, liberté de mouvement adéquate. (…)

Qu’est-ce qu’une posture correcte et saine?

Jusqu’à présent, nous avons parlé des blessures dues à une mauvaise posture corporelle du cheval et de la façon dont cette posture se produit. Voyons maintenant quelle est la bonne posture.

Avec une posture corporelle correcte, le poids de la cage thoracique est, entre autres, réparti également entre les deux membres antérieurs. Le cheval est alors en équilibre vertical. Si nous combinons l’équilibre vertical avec une énergie suffisante, la ceinture scapulaire est renforcée, le garrot monte et l’encolure ainsi que la tête prennent une position vers l’avant et vers le bas.

Position en avant, bas et ouverte. Le dos monte, le nez est devant la perpendiculaire mais pas trop bas.

Avec un cheval fort et stable dans son équilibre vertical, le chanfrein est approximativement parallèle à l’omoplate. Cela demande cependant un peu de force et la plupart des chevaux ne peuvent gérer cela qu’après une certaine période d’entraînement, surtout s’ils sont hypermobiles et / ou se réhabilitent à partir d’un schéma locomoteur incorrect.

Grâce à une ceinture scapulaire active, les membres antérieurs s’élèvent facilement du sol et ont le temps d’avancer librement depuis l’épaule et de s’étirer avant le poser. Les sabots des antérieurs se posent sur le sol sans d’abord faire un mouvement grotesque de haut en bas et se retirent juste avant l’appui. L’antérieur est peu de temps a l’appui, ce qui permet également au postérieur de s’engager facilement vers l’avant. Grace à la montée du garrot, les antérieurs et les postérieurs se libèrent et ont plus de protraction. La ligne du dessous se renforce et soulève le dos, le faisant s’horizontaliser.

Début de rassembler correct. La ligne du dessous se ferme tandis que la longueur de l’encolure reste. Le garrot monte plus haut et l’arrière-main s’abaisse

Avec une position vers l’avant, bas et ouverte correcte, le nez ne doit pas être trop bas. Si nous laissons le nez trop bas, le dos remontera, mais le poids viendra trop sur l’avant main. C’est ce que nous appelons «extension complète de l’encolure», qui peut également être une bonne posture dans certaines situations, mais pas une posture qui ne doit pas être tenue trop longtemps en raison du report de poids excessif sur les antérieurs.

La position en avant, ouverte et vers le bas est la base à partir de laquelle vous pouvez continuer à vous entraîner vers le rassembler. Le rassembler est la transition du poids de l’avant main vers l’arrière-main. Le cheval ferme sa ligne du dessous et étend encore plus sa ligne du dessus. Les postérieurs sont plus engagés sous le corps, restent au sol plus longtemps et fléchissent davantage dans toutes les articulations. Cela donne ce joli mouvement souple et élastique. Les antérieurs auront plus de liberté de mouvement.

Une erreur courante consiste à raccourcir l’encolure pendant le rassembler. En raccourcissant l’encolure, le garrot s’effondre, la pression au niveau de la base de l’encolure augmente, la ligne du dessous s’allonge et le dos se creuse. Le mouvement de l’antérieur est bloqué en même temps que celui de l’engagement du postérieur.

En maintenant la longueur de l’encolure à toutes les étapes de l’entraînement, nous préservons également le mouvement de la tête et du cou. Cela permet à l’ensemble du mouvement de bien circuler d’arrière en avant à travers le corps, le système fascial peut faire son travail et votre cheval reste en bonne santé.

Alors ne vous laissez pas berner. Le véritable rassembler vient du corps et non pas du raccourcissement de l’encolure. Le vrai rassembler donne au cheval plus de contrôle sur son corps lui permettant de répondre aux aides les plus fines. On a même un peu l’impression qu’il peut lire dans l’esprit du cavalier. Il est confiant et aime trouver les bonnes réponses.

Il grandit mentalement et physiquement, il a plus de liberté de mouvement, il peut être confiant et devenir fort... et fondamentalement beau.

Voir aussi:

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A propos de l’auteur | Services

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Libération myofasciale | Equine Fascia and Trauma release

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Ressources | pour aller plus loin

Le ebook gratuit en français « Prévenir les blessures – Ce que vous pouvez faire pour garder votre cheval en bonne santé! » à télécharger sur le site du Dr. vet. Leibbrandt [ebook a été traduit aussi en Anglais, Espagnol et Néerlandais]; les autres ressources sont en anglais uniquement:

Le livre « Compassionate Training for Today’s Sport Horse » (en anglais) du Dr. vet. Karin Leibbrandt « Biomechanics in Four Dimensions The Key to improving Posture, Balance and Strength« 

E-Learning / online training en anglais sur Horse in Mind plateforme e-learning du Dr. Leibbrandt : « Sustainable, injury-free training for a healthy and happy horse » (« Develop your observational skills and senses, improve your techniques and prevent overload and injuries, by using the most recent insights in biomechanics and sustainable horse training. » This course is more detailed and has more background information than the Equitopia course below. It also contains information on lunging and riders seat, balance and posture. Students have the possibility to sent in videos with questions and we have several Q&A’s. There are several rounds per year. If interested put your name on the emailing list (link here) you’ll be informed about the next start date.

La formation (en anglais) du Dr. vet. Karin Leibbrandt sur Equitopia « Compassionate Training for Today’s Sport Horse »

Videos très pédagogiques:

Recognizing Topline Syndrome (Equitopia)

Top Line Syndrome

The Biomechanics of Engagement :The Essential Components of Self Carriage

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